À quelques jours de la rentrée, alors que la majorité des enfants se prépare à retrouver le chemin de l’école, certains ignorent encore dans quelles conditions ils feront leur rentrée et où ils dormiront ce soir.
Après le triste record de 3 000 enfants à la rue enregistré en octobre 2023, le sursaut attendu de la part des pouvoirs publics n’a pas eu lieu et l’impuissance publique en la matière perdure. Cette année est une fois de plus marquée par des promesses non tenues par le Gouvernement comme l’annonce sans concrétisation d’une hausse du budget de l’hébergement de 120 millions d’euros. Quant aux départements, certains négligent leurs responsabilités en matière de prise en charge des mineurs non accompagnés, des femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans sans abri. Pendant ce temps, la situation des enfants à la rue se dégrade : d’après le baromètre publié par la FAS et l’UNICEF France, dans la nuit du 19 août, 2 043 enfants sont restés sans solution d’hébergement après l’appel de leur famille au 115. Ce chiffre est en hausse de 3 % par rapport à l’an dernier et de 120 % par rapport à 2020.
Cet été, la situation a continué de se dégrader dans les territoires. Le préfet du Morbihan a remis 80 personnes à la rue au motif que leur situation « ne justifiait plus leur maintien au sein des capacités hôtelières », bafouant ainsi les principes légaux d’inconditionnalité et de continuité de l’hébergement. La métropole de Lyon a aussi déclaré mettre fin aux nouvelles mises à l’abri des plus vulnérables dont elle est responsable (femmes enceintes et mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans) en raison d’un manque de moyens. Dans la métropole de Lyon, le nombre d’enfants à la rue a plus que triplé en seulement deux ans.
En Île-de-France, le collectif Le revers de la médaille a recensé 26 évacuations de lieux de vie informels par l’État en seulement cinq mois, soit presque autant que pour l’ensemble de l’année 2022. Parmi ces personnes expulsées, des centaines de mineurs non accompagnés (MNA) en recours pour faire reconnaître leur minorité. La Coordination Nationale Jeunes Exilé.es en Danger estime qu’en 2024, moins d’un tiers des 3 800 MNA en recours sur le territoire métropolitain étaient hébergés par les institutions. Ils sont 1 100 à vivre dans la rue, et 1 200 à être hébergés grâce à la solidarité citoyenne. Les médecins et psychologues bénévoles chez Médecins du monde constatent sur le terrain les conséquences dramatiques sur la santé physique et psychique de ces enfants dont le développement est altéré par la vie à la rue, s’ajoutant aux traumatismes du parcours d’exil.
Cette violation flagrante des droits de l’enfant n’a que trop duré. Nous, associations, enseignants, parents d’élèves, enfants concernés, demandons que les paroles soient enfin suivies d’actes forts pour mettre l’Etat en conformité avec la loi et ses engagements internationaux. L’action de la société civile, comme celle du Réseau d’aide aux élèves sans toit, est essentielle pour renforcer la visibilité des enfants sans domicile et mettre les pouvoirs publics devant leurs responsabilités.
Le prochain gouvernement devra engager une politique ambitieuse et durable d’accès au logement et assurer l’accès inconditionnel à l’hébergement d’urgence, en dotant ces politiques de moyens à la hauteur des besoins.