Alors que la production des résidences sociales n’a pas été à la hauteur des dernières années, Action Habitat a souhaité aller à la rencontre d'élus, dont le rôle est déterminant pour lever les obstacles que rencontrent les acteurs sur le terrain, pour mieux comprendre leur vision de l’utilité sociale du Logement Accompagné.
Les résidences sociales sont nécessaires à la mixité sociale et au dynamisme de notre ville.
Entretien avec Ian Brossat, Adjoint au Logement de la Ville de Paris
Quelle place la ville de Paris souhaite-t-elle donner à la résidence sociale au sein de sa politique de l’habitat ?
La ville de Paris fait du droit au logement et de la lutte contre les inégalités l’une de ses priorités. Aujourd’hui Paris compte 23 % de logements sociaux, mais nous ne comptons pas nous arrêter là. Paris comptera 25 % de logements sociaux en 2025. Évidemment, la crise sanitaire et les contingences historiques peuvent nous compliquer la tâche, mais nous ne souhaitons en aucun cas ralentir la cadence. À titre d’exemple, nous avons inauguré, le 6 mai dernier, 23 logements sociaux familiaux à quelques mètres des Champs-Élysées. Les familles modestes et de la classe moyenne doivent pouvoir vivre dans tous les arrondissements.
Quels objectifs vous êtes-vous sur ce nouveau mandat ?
Notre mandat est clairement animé par le désir de poursuivre nos efforts et d’aller encore plus loin. Notre objectif est l’atteinte d’un taux de 25 % de logements sociaux en 2025 et 30 % en 2030 sur le territoire parisien. De même, nous souhaitons amplifier la rénovation thermique des logements.
À titre personnel, êtes-vous convaincu de la pertinence des résidences sociales ? Pensez-vous qu’il s’agisse d’un bon levier pour maintenir une certaine mixité sociale au cœur de la capitale ?
J’en suis convaincu ! Il est nécessaire d’avoir des résidences sociales en quantité et dans tous les quartiers parisiens. Les résidences sociales permettent à de nombreuses personnes de vivre dans une ville encore trop difficile d’accès pour les personnes les plus modestes. Les résidences sociales sont nécessaires à la mixité sociale et au dynamisme de notre ville. Nous voulons une ville accessible à tous.
La ville de Paris a mené plusieurs projets ces dernières années avec des gestionnaires du logement accompagné. Est-il facile de faire accepter ces projets sur le terrain ?
Globalement, nous parvenons à nous mettre d’accord et à construire des projets sérieux en bonne intelligence. Évidemment parfois ça ne plait pas à tout le monde et il faut convaincre, retravailler les projets ou les repenser. Mais le plus souvent nos interlocuteurs sont conscients de leur importance. L’objectif n’est pas d’aller contre ou de forcer les choses. Je posais par exemple il y a quelques semaines la première pierre d’une pension de famille au cœur du Triangle d’Or, dans le 8ème arrondissement. Le fin dialogue entre le maitre d’œuvre, l’architecte, le futur gestionnaire, la fondation Abbé Pierre et la Mairie d’arrondissement a permis d’éviter les recours sur cette opération.
Quel regard portez-vous sur les acteurs du secteur avec lesquels vous êtes amenés à travailler ?
Je suis satisfait de voir que nous convergeons vers des projets communs nécessaires à la poursuite de notre politique sociale. La Ville de Paris s’emploie à faire du logement pour tous et ce, sans faire le jeu des logiques urbaines passées. Nous appuyons et finançons donc tous les projets qui vont dans ce sens. Beaucoup d’éléments sont forcément à prendre en compte et nos partenaires de projets savent à quoi s’attendre. Nous voulons des logements de qualité, respectueux de l’environnement, et accessibles à tous. Jusque-là, nous parvenons à concilier ces objectifs avec des projets de qualité. Quand je pense aux logements sociaux et étudiants situés à Ourcq-Jaurès dans le 19ème arrondissement et pensés par Lacaton & Vassal (prix Pritzker 2021), je ne peux qu’être ravi de travailler avec de tels acteurs, investis dans ce projet d’un Paris pour toutes et tous.
Parmi les projets menés, celui de la rue Nollet avec Hénéo se veut ambitieux à la fois au niveau architectural et environnemental. Est-ce aussi une manière de modifier l’image du logement dit « très social » ?
Nous ne sommes pas dupes et nous savons que le logement social n’est pas toujours bien perçu. Mais au-delà de cette question de perception, je dirais que le principal objectif c’est aussi de prendre en compte les reproches qui ont pu être faits à ces logements. Il faut considérer ces résidences sociales en prenant en compte nos connaissances actuelles et en ayant du recul. Aujourd’hui on ne peut pas construire du logement social de la même manière. Il faut prendre en compte l’environnement et son image. Si on construit du logement seulement pour construire du logement on ne respecte ni les futurs habitants ni les riverains. C’est pourquoi nous sommes engagés à produire du logement accessible mais également esthétique. Le projet de la rue Nollet est l’exemple même de notre vision du logement social : 85 logements, une résidence polyvalente ; mais avec évidemment la recherche d’un projet esthétiquement innovant.